Vous vous demandez dans quel état cérébral vous mettra l’hypnose ? Serez-vous assoupi, endormi, ou, à l’inverse, complètement réveillé ?
S’il était admis depuis longtemps que l’hypnose provoquait un état proche du sommeil, les recherches actuelles en neurosciences dévoilent aujourd’hui de nouvelles informations. En effet, les imageries médicales révèlent que l’activité cérébrale sous hypnose ne ressemble ni à l’état de sommeil, ni à l’état d’éveil, mais à un état particulier, où certaines zones du cerveau présentent une hyperactivité remarquable, qui pourrait notamment expliquer le pouvoir analgésique de l’hypnose.
L'HYPNOSE : PLONGÉE DANS UN PROFOND SOMMEIL ?
« Vous vous sentez lourd, et cet état vous incite à vous abandonner complètement et à plonger dans un sommeil profond… »
Nous transportons tous ce cliché de la scène chez l’hypnotiseur. Les yeux rivés sur un petit objet brillant posé au creux de sa main, ou basculant de droite à gauche pour suivre son pendule, jusqu’à atteindre un état de demi-sommeil où nous n’aurons plus la maîtrise de nos pensées et de notre corps.
Si cette conception de la transe hypnotique comme un état proche du sommeil, voire de la torpeur et de la léthargie, est ancrée si puissamment dans nos sociétés, c’est parce qu’elle s’est construite depuis les âges les plus anciens de l’humanité, lors des scènes chamaniques à la Préhistoire, jusqu’aux travaux du docteur français Jean-Martin Charcot au XIXe siècle.
Hypnos : dans les bras du dieu du sommeil
Au XVIIIe siècle, les médecins hypnotistes construisent le nom de l’hypnose en empruntant à la mythologie grecque le terme « hypnos », qui veut dire « sommeil », et qui donne aussi son nom au dieu antique du sommeil. Cette dénomination montre à quel point le sommeil et l’hypnose sont liés dans les esprits. Et en effet, dans les bras du dieu du sommeil, les hommes voient leurs corps réparés, leurs plaies cicatrisées et leurs peines, consolées.
James Braid et le sommeil nerveux
Dans cette lignée, le médecin irlandais James Braid compte sur la fatigue nerveuse de ses sujets pour les plonger dans un état de sommeil profond favorable aux suggestions. Il les contraint ainsi à observer, en louchant et sans relâche, l’objet brillant qu’il a placé juste au-dessus de leurs yeux. Il utilise notamment cette technique en intervention chirurgicale, à une époque où les patients ne sont pas encore endormis à l’éther…
« J’ai adopté la neurohypnologie – un mot qui signifiera aussitôt à tous ceux qui connaissent le grec, que c’est la raison ou la doctrine du sommeil nerveux ; le sommeil étant l’analogie la plus constante et la plus naturelle des phénomènes primaires du mesmérisme; le préfixe « nerveux » le distinguant du sommeil naturel. »
– James Braid
Charcot et la léthargie
De nombreux médecins se succèdent pour faire avancer cette approche de l’hypnose comme un état proche du sommeil (Du sommeil et des états analogues considérés surtout du point de vue de l’action du moral sur le physique, 1866, par le docteur Ambroise-Auguste Liébeault). Le plus célèbre reste le docteur Jean-Martin Charcot, qui s’intéresse à l’hypnose dans le cadre du traitement des personnes atteintes d’hystérie. Il détermine ainsi 3 états d’hypnose obtenus pendant la séance:
- la léthargie : le sujet ne bouge plus, mais il présente une hyperexcitabilité neuromusculaire au moindre contact ;
- la catalepsie : c’est le moment où l’hypnothérapeute obtient du sujet qu’il rouvre les yeux (par le son d’un gong ou un décompte par exemple) et où son corps est malléable ;
- le somnambulisme : le sujet parle et bouge normalement, après un déclencheur de type friction du crâne ;
Le sujet présente un oubli complet, une amnésie, dès le réveil.
On comprend, dès le choix des mots, que Charcot et ses partisans concevaient le travail en séance comme la recherche d’un état de sommeil hypnotique, où le sujet ne pense qu’à abandonner, lâcher prise avec sa conscience, jusqu’à s’endormir.